lundi 15 août 2016

Chapelle St Buc au Minihic sur Rance.
Bernadette Vallin : Mes avirons sont mes pinceaux

Tout ce qui concerne la mer
intéresse Bernadette Vallin,
des phares aux bords de mer,
des bateaux aux plages
sur lesquelles jouent les enfants.
C'est à douze ans que Bernadette Vallin débarque à Lannion, avec ses cinq frères et sœurs. Un été, elle embarque comme matelot avec un couple d'Anglais sur un beau yacht et se souvient ''qu’à midi et à 17h, on se mettait à la cape pour prendre un whisky ou le thé !''.

Deux Tours de France à la voile dont un en équipage féminin, deux participations à la course de l'EDHEC ainsi qu’au Défi des ports de pêche : Bernadette se taille rapidement une réputation de solide équipière...

Si tu aimes la mer, embarques à la pêche

Bernadette semblait bien partie pour intégrer le milieu des ''voileux''. Après le bac, elle s'inscrit pourtant à la Sorbonne et aux Beaux-Arts.
Son intérêt pour la mer ne la lâche pas et, quand elle entend ses amis parler du ''Bel Espoir'', le trois-mâts du père Jaouen sur lequel ils font leur service militaire, sa curiosité est la plus forte. Acceptée comme membre d'équipage, Bernadette embarque bientôt sur le ''Rar Avis'', l'autre grand voilier du Père Jaouen, pour le tour de l'Atlantique.
C'est pendant cette traversée, lors d’un quart de nuit, qu'une discussion avec Michel Jaouen va relancer les dés de son destin : ''Si tu aimes la mer, tu n'as qu'à embarquer à la pêche'', lui lance-t-il. Ce conseil sonne comme un défi chez la jeune fille de vingt-deux ans...
Sur les quais de Perros, dans les années quatre-vingt, il y a encore beaucoup de pêcheurs. Bernadette a tôt fait de repérer un ancien langoustier d'Audierne dont le patron a la réputation d'être le meilleur pêcheur mais aussi le plus dur. On ne sait pas trop ce qu'il a pensé en voyant arriver ce gabarit d'un mètre-cinquante-cinq et de 50 kilos tout mouillé, mais il lui a répondu : ''Si tu travailles comme un homme, tu seras payée comme un homme !'' 

Bernadette embarque avec les deux matelots et prend sa place à bord.
À vingt-cinq ans, elle décide de passer le capacitaire, parce qu'elle sait qu'elle ne restera pas matelot toute sa vie. Elle passe six mois à l'école de pêche de Douarnenez. Elle aurait pu acheter ensuite un bateau et devenir patron, mais la lourdeur des investissements l'effraie. Encore une  fois, c'est une idée de la famille Jaouen qui va relancer les dés. L'un des frères de Michel se lance dans le relevage de palourdes et l'incite à en faire autant. Pourquoi pas ?
Grâce à son capacitaire, elle obtient une concession d'un hectare sur le domaine maritime à Plougrescant. Tout se passe bien jusqu'à ce que la maladie s'attaque au mollusque. La situation devient critique et, en 1992 Bernadette perd la moitié de sa production et décide de jeter l'éponge...
Cette fois, elle reprend les pinceaux à temps plein, ou presque, car elle va avoir rapidement deux enfants...

Phares et influences des Nabis

L'influence des nabis est très perceptible dans ses premiers tableaux à l'huile qui représentent des scènes de plage, très lumineuses où jouent des enfants. Bernadette renoue ensuite avec le bois pour une série de vues sur mer qui apparaissent derrière des rideaux d'arbres. Certains y liront une proximité avec le travail de son compagnon, Claude Le Maut, dont le métier d'arboriste consiste à tailler harmonieusement les végétaux.

 La mer est toujours présente sur ses tableaux où les couleurs franches, les motifs simples - la voile rouge d'un cotre tranchant sur le ciel bleu vif - expriment une poésie forte et naïve, toujours influencée par la palette des nabis. ''ll y a deux ans et demi, ]'étais en résidence d'artiste à l'île Wrac'h avec deux amies. En rentrant, je me suis mise à peindre des phares et depuis je n'ai pas arrêté''.
Trois ans plus tard, les phares ont pris toute la lumière. Elle se tourne aussi vers les motifs de vagues et de rochers, utilisant notamment le papier collé, le marouflage...
Cette mer sur laquelle elle a navigué, ou elle a travaillé, où elle s'évade aujourd'hui, lui fait explorer une autre forme de liberté, la plus précieuse, celle des territoires imaginaires.
''Les phares, je vais peut-être arrêter un jour d'en peindre. Mais la mer... je l'ai toujours dans la tête''.

M2M
(D'après un article du Chasse-Marée)

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