La tempête avait dû souffler dur, pour mettre le brick dans un tel état. L'épave était entrain de sombrer. Définitivement. Seuls apparaissaient encore sous un invraisemblable fatras de débris quelques voiles enflées d'embruns, attelées par je ne sais quelle "ligne de vie" au gréement disloqué du navire...
Le plaisir des encombrants
Voilà deux jours que je faisais des allées et venues entre la maison de Saint-Briac et la déchetterie de notre communauté de communes. Notre future installation de retraités dans cette maison de bord de mer nécessitait du vide, indispensable à l'accueil du futur déménagement.
Je venais de me garer, cul à la benne pour y vider le contenu du coffre de ma voiture lorsqu'une auto tractant une remorque vient se garer à proximité... Aussitôt mon instinct de chasseur se met en éveil, un oeil sur le contenu de la remorque, l'autre sur le proprio. Une vieille valise, de vieilles photos, de vieux chiffons... bien sûr, tout était vieux. Dessous, dépassant légèrement l'écume du fouillis, un vieux cadre doré laissait entrevoir ce que je pris pour la promesse d'une "bonne affaire" !
- Excusez-moi, Monsieur : ce cadre, est-il bien destiné à la benne ?
Quelle question !
- Bien sûr, mais ce ne sont que des "vieilleries" !
- Me permettez-vous de lui donner une seconde vie en le récupérant, s'il vous plait ?
On dit s'il vous plait, quand on veut mettre toutes les chances de son côté !
- Je vous en prie, Monsieur !
Me saisissant du dit-cadre et du tableau qu'il encadrait, je tirais l'ensemble pour découvrir un de ces chromos, relativement courants dans les années 20 et 30 et qui reproduisait sur toile une huile du paquebot Normandie.
L'original avait certainement été commandé par la Compagnie Générale Transatlantique propriétaire du navire à Albert Brenet, peintre de la Marine, à fins de reproductions que les passagers pouvaient ensuite acquérir à bord du paquebot.
- Bingo !
Et dans cet état, c'est particulièrement rare !
Je m'enhardis aussitôt et plonge en apnée dans la remorque pour en sortir, cette fois... une voile en bois. Laquelle doit sûrement appartenir à une maquette de bateau, devinai-je !
Je continue donc fébrilement à "fouiller" et exhume enfin - je devrais dire "sauve d'un naufrage irrémédiable" - un magnifique ex-voto représentant un brick-goëlette sur une mer peinte et délicatement ondulée...
Contenant mon émotion je m'enquerrais du destin promis à "la chose" puis, avec l'assentiment de l'ex-propriétaire-armateur, en récupérais le plus discrètement possible la coque disloquée ainsi que les vestiges de gréement : voiles en bois, accastillage, cordages, espars divers, pauvres témoins immergés d'un bien triste naufrage.
Retour au bercail. Il me fallait encore affronter un (probable) avis de coup de vent. Mon épouse en effet me voit revenir de la déchetterie chaque fois avec une certaine appréhension ; celle de trouver à mon retour une voiture aussi remplie d'encombrants, nouveaux il est vrai, qu'elle l'était en partant...
Mais quelle mauvaise langue fais-je ?
Tout juste ai-je eu à "subir" une... bise, légère et rassurante !
MM
Rendez-vous dans quelques mois pour le nouveau lancement du bateau...
mardi 26 avril 2011
Naufrage en remorque
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